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L’étude du Centre fédéral d’expertise (KCE) sur le nombre insuffisant d’infirmiers

18 Fév, 2020

Question orale de Mme Sobry à Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes, sur « L’étude du Centre fédéral d’expertise (KCE) sur le nombre insuffisant d’infirmiers ».  

Mme Sobry (MR). – Madame la Ministre, dans son étude intitulée « Dotation infirmière pour des soins plus sûrs dans les hôpitaux aigus », le KCE constate qu’un infirmier qui travaille dans un hôpital belge s’occupe en moyenne de 9,4 patients, alors que la norme de sécurité qui est internationalement acceptée est de huit patients maximum par infirmier.  

La KCE rapporte que : « Si depuis 2009, et l’étude européenne RN4CAST, quelques évolutions positives sont observées, comme une légère diminution du nombre de patients soignés par un seul infirmier, de meilleures relations de travail entre les médecins et les infirmiers, ou encore une amélioration de la vision sur la qualité des soins, le bien-être au travail des infirmiers, quant à lui, s’est fortement détérioré avec notamment un risque accru de burn-out ou l’augmentation de l’insatisfaction au travail. Ce constat que le ratio patient/ infirmier est toujours trop élevé, bien supérieur aux normes internationales, implique que de nombreux patients soient exposés à un environnement pouvant être considéré comme potentiellement dangereux. » Cela impacte aussi l’environnement de travail des infirmiers. Le rapport révèle d’ailleurs qu’un infirmier sur dix envisage de quitter la profession.  

Il préconise donc que : « des moyens supplémentaires soient investis chaque année, de façon structurelle, et que l’on veille à ce qu’ils soient utilisés efficacement pour réduire le nombre de patients par infirmier dans les services où c’est le plus nécessaire. Les hôpitaux doivent rendre l’environnement de travail attrayant, sûr et agréable pour leur personnel infirmier et les décharger des tâches pour lesquelles ils sont surqualifiés. Ces mesures permettront de diminuer le risque de burn-out et de rendre la profession plus attrayante, avec l’espoir d’attirer à nouveau de nouvelles recrues ».  

Bien que certaines mesures pouvant être prises relèvent des compétences du Fédéral, comment peut-on à notre niveau revaloriser le métier d’infirmier ? Le plan de mise en réseau des hôpitaux s’assortira-t-il de cette revalorisation ? Des contacts avec votre homologue fédéral sont-ils en cours à ce sujet ?  

Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes. – Madame la Députée, un des enjeux majeurs de ces prochaines années en matière de santé sera effectivement d’améliorer l’attractivité de la profession d’infirmier pour augmenter le nombre d’étudiants dans ces filières et pour répondre à la problématique de la pénurie d’infirmiers disponibles sur le marché de l’emploi.  

Cette problématique n’est pas neuve, des efforts ont déjà été entrepris via notamment un plan d’attractivité initié en 2008 par le Fédéral, mais les dispositifs prévus en matière d’allègement de la charge de travail et du stress, de reconnaissance des qualifications infirmières, d’amélioration des rémunérations, d’amélioration de la reconnaissance sociale et d’association à la prise de décision se heurtent, selon l’Association belge des praticiens de l’art infirmier, à diverses mesures prises dans le cadre de la politique de santé fédérale. Par exemple, le raccourcissement de la durée de séjour en hôpital qui, en augmentant l’intensité des soins, a également augmenté la charge de travail des infirmiers, dit l’association belge des praticiens. Ou encore le peu de mesures prises pour renforcer la qualification ou les rémunérations des infirmiers, ainsi que pour améliorer la reconnaissance sociale ou associer les infirmiers aux décisions les concernant, dans le cadre de la réforme des réseaux hospitaliers par exemple. Le fait d’avoir allongé les études sans les lier à l’augmentation du salaire n’a pas aidé le modèle non plus.  

Une revalorisation salariale est certes une des pistes à envisager afin d’accroître l’attractivité. Il ne s’agit pas de la seule piste à explorer, comme le souligne l’étude du Centre fédéral d’expertise des soins de santé, le KCE, sur « La dotation infirmière pour des soins plus sûrs dans les hôpitaux aigus ». Selon le KCE, il faut également travailler sur l’amélioration des conditions de travail et sur la sécurité des soins, tout en déchargeant les infirmiers d’une série de tâches qui ne ressortent pas de leurs compétences par l’engagement de personnel de soutien, mais non infirmier.  

Si la Région wallonne a été concertée dans la rédaction de l’étude du KCE, elle ne dispose pas de compétences pour participer au travail de revalorisation du métier d’infirmier, car le contenu et l’attractivité des études dépendent de l’enseignement supérieur qui est une compétence de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Toutefois, la FWB doit respecter la législation fédérale en la matière, c’est la loi du 10 mai 2015 relative à l’exercice des professions des soins de santé. En outre, le Fédéral a dû transposer la Directive européenne 2013/55/EU dans la législation belge le 27 juin 2016. La publication de l’AR du 27 juin 2016 a modifié la loi relative à l’exercice des professions des soins de santé. La Région wallonne ne dispose pas non plus des compétences pour participer au travail de revalorisation parce que la valorisation des conditions de travail des infirmiers salariés dans les hôpitaux et le remboursement des actes infirmiers sont une compétence exclusive du Fédéral. Ainsi, la fixation d’un nombre de patients par infirmier par type de service, qui est une des recommandations du KCE, fait partie de la compétence organique du Fédéral, car ayant un lien direct avec le financement et présentant un caractère structurel. Comme ministre de la Santé wallonne, je serai attentive à ce que l’étude du KCE, qui est à présent entre les mains de la ministre fédérale de la Santé publique, Mme De Block, soit abordée lors d’une prochaine Conférence interministérielle.  

Au niveau de la Wallonie, la Déclaration de politique régionale 2019-2024 prévoit l’amélioration des dispositifs d’attractivité pour l’installation en zones de pénurie de métiers de première ligne, notamment les médecins généralistes, les dentistes et les infirmières et infirmiers, tout en veillant à l’accessibilité financière des patients. Dans cette perspective, j’ai demandé que l’on procède à une évaluation du nouveau dispositif Impulseo et, le cas échéant, de réorienter en fonction de la pertinence de l’évaluation si cela devait être nécessaire. La Wallonie collaborera également avec la Fédération Wallonie-Bruxelles pour mettre en place une commission de planification francophone des sousquotas des métiers de la santé basée sur les données d’un cadastre dynamique et permanent et sur une estimation des besoins.  

Vous m’interrogez, enfin, sur l’impact de la mise en réseau des hôpitaux sur le personnel infirmier. Cette réforme poursuit l’objectif de rationaliser l’offre de soins et de répartir les tâches entre les hôpitaux d’un même réseau. Toutes les missions de soins ne seront pas offertes dans tous les hôpitaux du réseau, mais une couverture doit être faite dans l’intérêt du patient. En ce sens, on peut s’attendre, à terme, à une réorganisation du travail infirmier dans certains secteurs, mais je pense qu’il est trop tôt pour se prononcer sur les effets de cette réforme. J’ai eu l’occasion de rencontrer mon homologue fédérale pour en discuter avec elle, mais de manière informelle à ce stade. Elle me confirme qu’elle ne prendra pas les arrêtés royaux puisqu’ils sont dans un gouvernement en affaires courantes et par ailleurs un gouvernement minoritaire. Il s’agit notamment des règles qui devront fixer les missions de soins locorégionales et les missions de soins suprarégionales.  

Je voudrais vous signaler également que la pénurie en personnel infirmier touche la plupart des pays au sein de l’OCDE. L’OMS a désigné 2020 « Année internationale des sages-femmes et du personnel infirmier ». Selon l’OMS, il faudrait 9 millions de sages-femmes et d’infirmiers supplémentaires dans le monde pour espérer réaliser la couverture sanitaire universelle à l’horizon 2030.  

J’en termine. Ce matin, dans le cadre de mes demandes de permis de travail qui ont été refusées parce que l’on considérait que le métier d’infirmier n’était pas un métier en pénurie, j’ai demandé que l’on essaye de revoir si les critères étaient logiques parce qu’il me semblait que le métier d’infirmier était au contraire un métier en pénurie. Il semblerait qu’il y ait différentes listes de métiers en pénurie selon que l’on soit dans des dispositifs réglementaires différents. J’ai donc demandé que l’on analyse et qu’un seul critère soit pris en considération. Même si rien n’est jamais simple, à partir du moment où, au niveau européen ou au niveau mondial, on manque d’infirmiers, je n’aurais pas envie qu’il y ait de plus une fuite de cerveaux et que l’on prive d’autres pays d’infirmiers dont ils ont aussi énormément besoin.

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