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La crainte de certaines femmes d’une agression dans les transports en commun

9 Fév, 2021

Question orale de Mme Sobry à Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Egalité des chances et des Droits des femmes sur « La crainte de certaines femmes d’une agression dans les transports en commun » 

Mme Sobry (MR). – Madame la Ministre, il y a quelques mois, une enquête réalisée par BEMOB et commandée par le SPF Mobilité mettait en évidence un triste constat : près d’une femme sur trois craint de se faire agresser, sexuellement notamment, lorsqu’elle prend le train. On parle de 29,1 % des femmes et de 21,4 % du côté des hommes. Bien sûr, cette question relève en grande partie des compétences du Fédéral. Le ministre de la Mobilité a d’ailleurs expliqué à la Chambre qu’un plan d’action spécifique était en finalisation à la SNCB. Il confirme, par ailleurs, cette triste réalité tout en annonçant que 197 appels de plaintes pour des faits de mœurs ont été recensés en 2019, chiffre en augmentation depuis deux ans.  

Ce qui m’inquiète particulièrement et qui relève de votre compétence, c’est que les femmes soient davantage concernées. Je sais que vous serez d’accord avec moi, il n’est pas tolérable qu’une femme sur trois renonce ou appréhende de prendre le train ou tout autre transport, par crainte d’une agression. Faire baisser ces chiffres et redonner aux femmes de la confiance par rapport à leur sécurité dans l’espace public est donc un défi important. Vous précisiez en septembre au sein de cette commission que dans le cadre de la Conférence interministérielle Droits des femmes, dont vous venez d’ailleurs de reprendre la coprésidence – et j’en profite pour vous en féliciter – la priorité a été donnée à la lutte contre le sexisme ainsi qu’à la lutte contre les violences, y compris contre les phénomènes de harcèlement dans l’espace public. Ceux-ci devant être combattus par l’éducation dès le plus jeune âge via des questions d’égalité hommes-femmes, notamment.  

Ce chiffre d’une femme sur trois qui craint de prendre le train vous interpelle-t-il ?  

Avez-vous pris contact avec vos homologues aux différents niveaux de pouvoir à ce propos ?  

Outre le Plan intrafrancophone de lutte contre les violences qui a été présenté fin de l’année dernière et dont les résultats ne sont pas attendus à court terme, quelles actions sont mises en œuvre pour lutter contre les agressions et le harcèlement des femmes dans l’espace public ?  

 

Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes. – Madame la Députée, je vous remercie de vous intéresser à ce sujet qui est important. Il y a quelques années, avec Mme Bonni, on a jeté un pavé dans la marre. On avait posé la question à M. Di Antonio : « Peut-on reconnaître qu’il y a un problème sur l’espace public et les transports en commun ? ».Il avait dit : « Mais il n’y a pas de plaintes ». Mais cela n’est pas une réponse. Il n’y a pas de plaintes, on le sait bien, c’est le chiffre noir, les gens ne vont pas aller porter plainte.  

On a donc voulu faire une enquête « maison », cela n’avait pas d’aspect scientifique et on est allés devant les abris de bus et on a interrogé les gens, on s’est fait aider par l’Université de Liège pour essayer de mener, avec une étudiante et des étudiants, une enquête qui montrait qu’effectivement, non seulement de très nombreuses personnes, la moitié au moins, avaient connu des faits de sexisme et de harcèlement dans les transports en commun, mais que surtout bon nombre d’entre elles avaient des phénomènes de déplacements et choisissaient soit de ne pas prendre certaines lignes soit de ne pas prendre le bus à certaines heures. Des phénomènes qui sont juste inacceptables. À travers cela, on a essayé de monter ensemble un travail avec toutes les collègues de tous les partis et des résolutions qui ont abouti sous l’ancienne législature avec toute une série d’engagements qui avaient été pris, notamment de faire une campagne dans les transports en commun, qui n’avait pas été réalisée, mais quand j’ai eu l’occasion de prendre la responsabilité ministérielle des droits des femmes, j’ai proposé à mon collègue, M. Philippe Henry, de nous engager ensemble dans une des réalisations ou des engagements qui avaient été faits dans cette résolution. Il a tout de suite accepté. Il a dégagé, et je l’ai fait également dans mes enveloppes, une partie des montants pour une campagne de communication, qui était prête cet hiver, mais on a décidé de la reporter puisque l’on a commencé le confinement. Elle démarrera le 8 mars prochain, symboliquement, parce que l’on veut faire des campagnes de communication à l’égard des personnes qui sont victimes de violences dans les transports en commun, mais aussi à tous les témoins. Ce que l’on veut, c’est aussi démystifier, dire que ce phénomène-là n’est pas acceptable. Ce n’est pas un tabou, on voit beaucoup que, dans les enquêtes ou dans les caméras, les gens détournent le regard et font semblant qu’ils n’ont pas vu.  

Il y a une forme de contrôle social. Si tout le monde comprend que ce phénomène n’est pas acceptable, alors il diminuera par lui-même parce qu’il y aura des réactions de la part des témoins. Je pense que cela va aussi contribuer à faire évoluer les choses. Il y a ce sexisme dans les transports en commun, mais il y a aussi le sexisme sur les réseaux sociaux qui frappe beaucoup les femmes, qu’elles soient journalistes, auteures, femmes politiques. Il y a donc du slut shaming, du revenge porn, des avances qui sont déplacées ou encore des propos dénigrants ou haineux, des actes qui ne sont pas sans conséquence et qui entravent leur liberté d’expression et de mouvement. La prise de conscience, c’est important, et il ne faut pas banaliser. Je voudrais signaler que, en 2014, Joëlle Milquet avait décidé de faire une loi contre le sexisme dans l’espace public. Évidemment, c’est difficile à mettre en œuvre, on le savait bien à ce moment-là, mais quelque part c’était un pari en disant : « On va quand même montrer qu’il y a une sanction et que c’est un acte répréhensible ». C’était donc en soi quelque chose d’extrêmement positif qui a eu son effet, mais on sait aussi que sa faiblesse est que, en termes de charge de la preuve, cela fait en sorte qu’il n’y a jamais de suites.  

C’est donc l’occasion maintenant de pouvoir procéder à une évaluation de ce dispositif, de cette loi, avec ses faiblesses, et d’essayer de voir comment les modifier. Cette évaluation va pouvoir se faire, c’est un des engagements que nous avons pris avec mes collègues dans le cadre de la conférence interministérielle Santé, où j’ai repris avec M. Antoniadis la coprésidence sur notamment ces questions. La campagne commencera le 8 mars. Je ne vais pas vous dévoiler les contours précis, mais on veut faire évoluer les mentalités de manière à mettre au centre des échanges entre hommes et femmes les notions de respect et d’égalité, et en appeler aussi à la responsabilité de chacun dans ce phénomène, qu’il y a lieu de combattre tous ensemble. On a demandé aux différents collègues des différentes entités de travailler sur ces questions, puisque des éléments relèvent du Fédéral et d’autres des entités fédérées. Il y a une volonté convergente de travailler sur cette thématique et je pense qu’il est possible de faire progresser la cause des femmes, du sexisme, dans l’espace public, dans les transports en commun, que ce soit les trains, les bus, les trams, les métros. Il faut s’inspirer du magnifique travail de la Commission femmes et villes de Liège, qui regroupe dans sa diversité des tas de femmes et d’associations, qui a pu modifier la configuration aussi de la ville pour faire en sorte que le sentiment d’insécurité des femmes, par exemple, que l’appropriation de l’espace public passe par des priorités, auxquelles les architectes hommes n’ont pas spécialement intégrées. Ce n’est pas une question d’insécurité, mais je défie quiconque de se retrouver en talons hauts, de quitter le Parlement et d’aller dans le centre de Namur. Objectivement, c’est plus facile de marcher sur la route que sur le trottoir, parce que c’est sûrement des hommes qui ont dû penser à mettre des petits pavés carrés instables et qui font en sorte que, au-delà du fait que l’on est une femme avec des talons, ce n’est pas possible. Imaginez aussi toutes les personnes qui ont des difficultés à marcher, les personnes en situation de handicap. Je m’éloigne un peu du sujet.  

 Ce que je veux dire, c’est que l’appropriation de l’espace public doit être envisagée dans sa diversité, dans l’aménagement du territoire et dans sa conception la plus large possible pour faire en sorte que les femmes et les hommes soient sur un pied d’égalité. Il y a du travail, mais il y a une volonté commune d’avancer ensemble.  

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